Près de Pont-Audemer, vendredi 10 avril 2020
Céline Mabire est coach sportive. Alors quand on lui diagnostique un mélanome en novembre 2013… Elle continue son activité ! Aujourd’hui en rémission depuis deux ans, elle est devenue maman après avoir vécu les tourments de l’après-cancer.
On m’a découvert un mélanome en novembre 2013, situé sur un grain de beauté. J’ai été opérée, tout avait été bien gratté. Mais un an et demi plus tard, on découvre une métastase, au même endroit, dans le cou, qui faisait comme une boule. Je subis à nouveau une opération. Et ça ne s’arrête pas là puisqu’en passant un Tepscan, on se rend compte, au printemps 2015, que j’ai deux tumeurs au cerveau. Stade 4, c’était grave.
Mon dermatologue m’a tout de suite envoyé à l’institut de lutte contre le cancer Gustave-Roussy, à Villejuif, qui est spécialisé dans le mélanome. Grâce aux avancées scientifiques, j’ai pu bénéficier d’une chimiothérapie par voie orale, donc je n’étais pas obligée de venir en hôpital de jour. Pratique, car j’habite en Normandie. J’ai eu quelques effets secondaires, mais peu, par exemple je n’ai pas perdu mes cheveux. Il n’y avait peut-être pas dans ma chimio le médicament qui attaque le système capillaire.
J’étais déjà coach sportive à l’époque ; j’avais effectué une reconversion professionnelle à 30 ans, après plusieurs années derrière un bureau dans l’import/export.
Après un bilan de compétences, j’ai passé un BPJeps activité physique pour tous. J’ai continué de travailler. Cela m’a permis de penser à autre chose, de ne pas être focalisée sur la maladie.
Je faisais aussi un déni de la mort : pour moi, je n’avais rien de grave, psychologiquement, je ne me sentais pas malade. Mais j’étais dans une étude clinique qui testait une nouvelle molécule.
Comme ce fut le cas pour d’autres personnes qui suivaient ce protocole, l’une de mes deux tumeurs a beaucoup grossi, après avoir longtemps regressé. En février 2016, j’ai subi trois séances très violentes de radiothérapie, qui ont été plus dures que la chimio. Et ça a touché des parties du cerveau : j’ai un peu perdu la mémoire, j’avais du mal à trouver mes mots, je bavais, aussi. J’ai tout de suite enchaîné avec de l’immunothérapie, toujours en continuant de travailler. En mars 2017, je n’avais plus rien ; en mai de la même année, on m’annonçait la rémission.
La professeure qui me suivait était étonnée de me voir aller bien et continuer de faire du sport. Au moment où j’ai commencé la chimio, je partais en vacances ; quand j’en suis revenue, mes prises de sang n’étaient pas bonnes. Elle m’a dit qu’il ne fallait surtout pas que je reprenne le sport. Mais je n’en avais pas fait pendant cette période ! Pour moi, ce n’était donc pas l’effort physique qui donnaient ces mauvais résultats. Alors contre son avis, j’ai repris en septembre.
Effectivement, mes parents et quelques amis avaient un peu peur que je fasse plus de malaises, d’autant que j’avais quelques effets secondaires qui s’apparentaient à des états grippaux, qui me donnaient l’impression d’avoir de la fièvre. Mais encore une fois, ce n’était pas le sport. Et je savais que sans mon métier, je n’allais pas arriver là où j’en suis aujourd’hui. Mais j’étais quand même affaiblie, mes muscles étaient un peu atrophiés.
Je ne souffrais pas, mais je sentais que je perdais de la masse musculaire. Comme je transpirais énormément, j’éliminais les toxines des médicaments.
Et quand je donnais des cours, je n’avais pas la grosse pêche, mais pas d’effet secondaire non plus. Mes adhérents m’ont d’ailleurs beaucoup soutenue.
DE LA RÉMISSION À LA GROSSESSE
Mais le plus dur a été l’après-cancer. Quand on m’a annoncé ma rémission, j’ai pété les plombs : je n’acceptais pas la situation, je n’acceptais pas de ne plus voir la professeure qui m’avait suivie. Elle a été pour moi une maman, une amie, une psy… Elle a été la seule personne pendant ces années de maladie qui a vraiment compté et sur qui j’ai vraiment pu compter. J’ai alors rejeté ma famille, mes amis, mon mari, avec qui je me suis mariée quelques mois seulement avant l’annonce du cancer.
J’avais l’impression qu’une deuxième vie s’offrait à moi, j’ai voulu tout quitter, divorcer. Je suis partie en vacances seule, chez une amie, dans une ville que je ne connaissais pas du tout… J’ai fini par me rendre compte que ce n’était pas ce que je voulais vraiment et au bout de quelques mois, tout est revenu dans l’ordre.
Mais je n’étais pas préparée à ce moment de flottement. Il fallait que ça explose, et je pense que ça a été utile.
Il nous a fallu attendre quelques temps après l’arrêt de l’immunothérapie pour avoir un enfant. Quand j’ai eu 40 ans, j’ai voulu essayer. Et je ne pensais pas tomber enceinte aussi rapidement !
Mon bébé est né le 8 décembre 2019. Il se porte très bien, je suis une maman comblée. Et j’ai repris le travail. Aujourd’hui, je suis auto-entrepreneure, je mène la danse le mercredi pour les enfants, la gym pour les seniors le matin, je travaille aussi dans un collège, dans un lycée, dans des sociétés… Je m’occupe de tous les publics. Et je fais beaucoup de sport avec mon mari ; je l’ai rencontré pendant ma reconversion, il était mon tuteur de stage. Prof de judo, entraîneur de rugby… On fait notamment du trail ensemble.
Céline Mabire est visible sur le site qui regroupe les activités adaptées de la région : www.sportsantenormandie.fr